Son
enfance, son adolescence, ses amies, ses petits amis, tout y est passé dans ce
verbiage qui a meublé nos soirées pendant quelques mois. Elle parlait sans
cesse comme si c’était la première fois qu’elle prenait connaissance des
sentiments conflictuels y liés. Son premier départ de la maison pour aller
étudier dans une ville éloignée, son refus de porter des fringues griffées,
mais son incapacité de s’en défaire de ce qu’elle avait accumulé… Je vous dis, c’était
comme si un ogre avait mangé ma douce et l’avait remplacé avec cette fille pleurnicharde
et ronchonne.
Le vin m’aidait à survivre ces soirs de récrimination. Au bureau
tout allait bien. La salope de boss est arrivée après que ma grognasse ait fini
par donner un sens nouveau à son passé.
J’avais
marre du vin, du pleurnichage psychanalytique, de son travail d’assimilation et
de celui d’accommodation qui visait la transformation de sa conduite et de son
mode de raisonnement, quand un soir, je luis ai proposé de faire un long voyage
initiatique et cathartique. Ce sont les deux mots que j’ai utilisé pour lui
proposer le projet. Vous savez, tous ces discours que les livres de
développement personnel servent pour améliorer la connaissance du soi et de ses
talents potentiels? Ma douce en raffolait et je n’avais d’autre choix que de
lire parfois des passages pour lui faire plaisir et pour mieux comprendre sa
tourmente. J’ai donc appris le langage et quand je lui ai présenté mon projet
j’ai utilisé ces deux mots.
L’effet a été instantané!